Revue de presse féministe & internationale du 13 au 19 avril

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Revue de presse féministe & internationale du 13 au 19 avril


FRANCE

MeToo continue ! Les féministes ne céderont pas !

Après le Manifeste des 343 paru dans le Nouvel Observateur qui avait rassemblé le nom de 343 femmes françaises et de nombreuses personnalités publiques reconnaissant avoir eu recours à un avortement clandestin et appelant à la légalisation de l’avortement, voici la tribune des 147.

Le 14 mai, est parue dans Le Monde la “Tribune des 147”. 147 femmes et hommes, personnalités publiques ou non, venant de différents milieux, travaillant dans différents domaines mais engagé·es chacun·es à leur manière dans la défense des droits des femmes, ont signé cette tribune. Ils·Elles demandent que des mesures concrètes soient prises pour mettre un terme aux violences sexistes et sexuelles par la mise en place d’une loi intégrale contre les violences sexuelles afin de protéger les victimes de violences et condamner les auteurs de violences. Cette tribune redonne du souffle au mouvement #MeToo qui commençait à désintéresser la presse malgré la récente apparition de #MeTooHôpital, dont on a insuffisamment parlé.

Une loi intégrale est aujourd’hui essentielle car en France 94% des plaintes pour viol sont classées sans suite, et ce chiffre est en constante augmentation puisqu’entre 2012 et 2020, la part des plaintes pour viols classées sans suite est passée de 82 % à 94 %. Le nombre de plaintes pour viols augmente de 10% tous les ans depuis 2017 mais seulement 6% des victimes de violences sexuelles portent plainte.

Pour plus d’informations, nous vous invitons à consulter notre article sur le traitement judiciaire en France des violences sexistes et sexuelles, cliquez ici !

 

Tribune des 147.

“Nous sommes 100, mais en réalité, nous sommes des centaines de milliers. Nos prises de parole  #Metoo ont révélé une réalité plongée dans le déni : les violences sexistes et sexuelles sont systémiques, pas exceptionnelles. Pour autant, une affaire semble en chasser une autre, qui nous écoute vraiment ?

Depuis sept ans, nous parlons pour nous et pour toutes les femmes, hommes et enfants qui ne peuvent pas le faire.
Les inégalités et les rapports de pouvoir favorisent les violences sexistes et sexuelles et le déni collectif protège les agresseurs. Nous ne sommes pas des chiffres : femmes et hommes de tous milieux professionnels, nous nous rassemblons pour demander une loi intégrale contre les violences sexuelles et sexistes, ambitieuse et dotée de moyens.

Car malgré le courage des victimes, c’est l’impunité qui grandit. Il est inacceptable que le taux de classement sans suite des plaintes pour viol ait atteint le taux délirant de 94% en 2020.

Nous n’acceptons plus les effets d’annonce sans suite. L’ajout du seul mot consentement dans la loi ne permettra pas de rattraper le retard abyssal de la France en la matière.

Nous demandons une loi intégrale qui permettra de clarifier, entre autres, la définition du viol et du consentement, introduire celle de l’inceste, de juger les violeurs en série pour tous les viols connus, d’élargir les ordonnances de protection aux victimes de viols, de faciliter la collecte de preuves, de créer des brigades spécialisées, d’interdire les enquêtes sur le passé sexuel des victimes, de permettre un accès immédiat et gratuit à des soins en psycho-traumatologie, de donner enfin les moyens financiers à cette politique publique et aux associations qui la mettent en place.

Nous sommes plus de 100, mais en réalité, nous sommes des millions à souhaiter que les violences sexuelles et sexistes cessent. Ce n’est pas une utopie. Depuis que nous sommes rassemblées et solidaires, nous savons que nous sommes si nombreuses et nombreux  que nos voix ne peuvent plus ne pas compter”.

 

Pour les femmes, pour l’avancée des droits des femmes et pour la fin de l’imputer des auteurs de violence, la CLEF a signé la tribune et nous vous encourageons fortement à la signer également !

 

Cliquez ici pour signer la Tribune des 147 !

 

Le Monde, « On persiste et on signe », 14 mai 2024.

 

FRANCE

#MeToo cinéma au festival de Cannes. 

La 77ème édition du festival de Cannes a débuté ce mardi 14 mai. La cérémonie d’ouverture a été tenue par Camille Cottin qui a fait référence dans son discours introductif au mouvement #MeToo en chanson !

 « Les rendez-vous professionnels nocturnes dans les chambres d’hôtels des messieurs tout-puissants ne font plus partie des us et coutumes du vortex cannois, à la suite de l’adoption de la loi #metoo, et on s’en félicite ».

Elle fait ici référence à la proposition de loi défendue par la tribune des 147 que nous venons de lire, proposition pour une loi intégrale contre les violences sexuelles qui permettrait de protéger les victimes de violences et de condamner les auteurs de violences, et qui reconnaîtrait l’inceste. 

Nous nous sommes réjouies de voir dans cette cérémonie d’ouverture une majorité de femmes présentes et mises à l’honneur, surtout après #MeToocinéma qui a permis de mettre en lumière l’impunité des hommes auteurs de violences sexuelles dans le milieu du cinéma et l’omniprésence de biais patriarcaux. On sait également grâce au Collectif 50/50 qui travaille sur la place des femmes dans le cinéma que seulement 5,2% des films présentés au Festival de Cannes sont réalisés par des femmes, que la part des femmes réalisatrices sélectionnées en compétition n’a jamais dépassé 20% dans toute l’histoire du Festival, que seuls 8% des grands prix ont été décernés à des femmes, et seulement 2% des Palmes d’or. Mais cette année, Juliette Binoche, signataire de la tribune des 147, a remis la Palme d’or à Meryl Streep ! C’était un grand moment d’émotion pour le cinéma et pour le féminisme ! 

 

On avance vers l’égalité et on ne reculera pas !

Cliquez ici pour signer la Tribune des 147 !

 

 

 

Le Monde, « Le festival de Cannes 2024 s’ouvre sous le signe de #MeToo cinéma, Meryl Streep récompensé d’une palme d’or d’honneur », 14 mai 2024.
France Info, « Festival de Cannes 2024 : la 77ème édition a été déclarée ouverte par Meryl Streep, saluée par une Palme d’or d’honneur », 14 mai 2024 .
Collectif 50/50, « Rapport » .

 

ARABIE SAOUDITE

Manahel al-Otaibi condamnée à 11 ans de prison. 

L’activiste de 29 ans Manahel al-Otaibi, qui défend les droits humains, et notamment les droits des femmes en Arabie Saoudite, vient d’être condamnée à 11 ans de prison. Le pays qui venait d’être désigné le 27 mars 2024 pour présider la Commission pour les droits des femmes de l’ONU expose par cette action son vrai visage : celui de l’antiféminisme !

Elle était portée disparue depuis novembre 2023, après avoir été arrêtée par les forces de l’ordre pour infraction à la Loi contre la cybersécurité. Défenseuse des droits des femmes, elle s’était montrée sur Snapchat sans voile dans un centre commercial. Son procès s’est tenu en secret en janvier 2024 et elle a été reconnue coupable d’ “infractions liées au terrorisme”. Elle a réussi à contacter sa famille le 14 avril 2024 et a décrit les conditions horribles dans lesquelles elle était détenue. Elle s’est faite rouée de coups par les forces de l’ordre, elle a la jambe cassée et n’a pas accès à des soins médicaux. 

L’activiste s’est opposée sur les réseaux sociaux à la loi de tutelle masculine et au port de l’abaya. En effet, la loi relative au Statut personnel de 2022 ne respecte pas l’autonomie des femmes et en fait d’éternelles mineures aux yeux de la société. Ainsi, même si en apparence les droits des femmes progressent en Arabie Saoudite puisqu’elles ont acquis un certain nombre de droits au cours des deux dernières décennies, notamment le droit de conduire, le droit d’avoir un passeport, le droit de voyager, … elles n’ont en réalité pas le droit le plus fondamental : celui de s’autodéterminer et de disposer d’elles-mêmes. En effet, elles n’ont pas le droit de décider par elles-mêmes et dépendent toujours aux yeux de la loi des hommes de leur famille : elles ne sont pas responsables. N’oublions pas que le pays est classé 131ème sur 146 en ce qui concerne le respect des droits des femmes, selon un rapport du World Economic Forum intitulé « Global Gender Gap report » datant de juin 2023.

Si vous souhaitez plus d’informations sur la situation des droits de femmes en Arabie Saoudite, nous vous invitons à cliquez ici  pour lire notre article sur la nomination du pays à la tête de la Commission pour les droits des femmes de l’ONU !

 

 

 

Amnesty International, « Manahel al-Otaibi condamnée à 11 ans de prison », 13 mai 2024.
France Info, « Arabie saoudite : Amnesty International s’inquiète de la disparition forcée d’une militante des droits des femmes », 21 février 2024.

 

FRANCE

Les femmes au volant, stéréotype sexiste ou exemple à suivre ? 

Vous l’avez peut-être vu en vous baladant dans les rues ou en prenant le métro, la nouvelle campagne de prévention routière “Conduisez comme une femme!”. Réalisée par l’association Victimes & Citoyens, la campagne renverse le cliché sexiste qui voudrait que les femmes soient des dangers sur la route. On connaît l’adage “Femme au volant, danger au tournant”.

Pourtant, les femmes sont en réalité bien plus prudentes et sérieuses sur la route que les hommes: chiffres à l’appui. L’association Victimes & Citoyens donne les siens pour commencer : 96% des victimes d’accidents qui se tournent vers elle sont les victimes d’accidents causés par des hommes. En effet, selon les chiffres de l’Observatoire interministériel de la sécurité routière, 84% des accidents sont causés par des hommes. Ainsi, les hommes causent bien plus d’accidents que les femmes, mais ils en sont également les premières victimes puisque 77,9% des victimes d’accidents sont des hommes. Les hommes ont également plus tendance à conduire en état d’ébriété avancée que les femmes. 93% des conducteurs ayant consommé de l’alcool et étant  impliqués dans un accident sont des hommes, et 84% des permis invalidés appartiennent à des hommes.

Que dire de ces chiffres ? Premièrement, les femmes présentent bien moins de comportements à risque en ce qui concerne leur conduite alors que les hommes, au contraire, les multiplient. Les préjugés sexistes ont encore la vie dure aujourd’hui, et pourtant c’est bien aux hommes d’adapter leurs comportements pour imiter celui des femmes, pour plus de sécurité sur la route. Mais comment expliquer que la conduite des femmes et celle des hommes soit si différente ? Il nous faut revenir à la racine de la construction sociale des stéréotypes de genre. Les femmes, toujours critiquées et jugées sur leur conduite, vont avoir tendance à avoir une conduite extrêmement vigilante ce qui tend à limiter les accidents, alors que les hommes, à l’inverse, socialement encouragés à préférer la vitesse, voire à “aimer le danger”, vont avoir tendance à multiplier les comportements à risque.

Mais quel est l’impact de ses comportements à risque pour la société ? Premièrement, le coût en termes de vie humaine, puisque 3 402 personnes ont trouvé la mort sur les routes françaises en 2023, et que 232 000 personnes ont été blessées en 2023, dont 16 000 gravement. Et notamment le coût humain auprès des plus jeunes, puisque la tranche d’âge présentant le taux le plus important de mortalité est celle des 18/25ans. Deuxièmement, le coût financier. Vous voyez où nous voulons en venir ? C’est évidemment l’heure de faire référence à Lucile Peytavin, qui a publié Le coût de la virilité aux éditions Anne Carrière en mars 2021. Dans cet ouvrage, elle compile l’ensemble des comportements masculins néfastes et ce qu’ils coûtent à la société. L’exemple le plus connu est le suivant : 90% des personnes condamnées par la justice sont des hommes et 97,1% des détenus sont des hommes. On peut donc considérer que l’ensemble des fonds de l’Etat utilisés pour faire fonctionner les établissements pénitentiaires est à cause des comportements masculins, et que la société se porterait donc bien mieux si les hommes reproduisaient les comportements des femmes. 

Dans cet ouvrage, elle accorde un chapitre à la sécurité routière. Elle montre que les accidents de la route engendrent des frais médicaux et sociaux pris en charge par l’Etat et des frais de dégâts matériels, sans compter que suite à un accident il y a arrêt de la production. Compilant tous ces chiffres, elle arrive au résultat suivant : le coût que représentent les comportements à risque des hommes sur la route, que l’on peut imputer à la virilité, s’élève à 13,3 milliards d’euros par an. 

Alors pour conclure, soyez raisonnables ! Conduisez comme une femme 🙂

 

 

 

Les Nouvelles News, « Conduisez comme une femme … pour rester en vie », 14 mai 2024.
Observatoire national interministériel de la sécurité routière, « Accidentalité routière 2023 en France », 31 janvier 2024.
Lucile Peytavin,  Le coût de la virilité, éditions Anne Carrière, mars 2021.