Mardi de la CLEF #32 : De la puberté à la vieillesse: comment le temps qui passe se vit dans nos corps de femmes ?

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Mardi de la CLEF #32 : De la puberté à la vieillesse: comment le temps qui passe se vit dans nos corps de femmes ?

 


De la puberté à la vieillesse : comment le temps qui passe se vit dans nos corps de femmes ?

 

Ce Mardi de la CLEF a été modéré par Danielle Michel-Chich, présidente de Femmes à la Une, Moira Sauvage, membre du CA de Femmes à la Une, et Céline Thiebault-Martinez, présidente de la CLEF. Cette discussion informelle a été l’occasion d’échanger sur le temps qui passe et qui marque nos corps. Chaque étape de la vie a ses défis, dès la puberté qui, aux yeux de la société, marque nos débuts dans le corps d’une femme.

 

Pour cette table ronde informelle sur le thème de la vieillesse nous avons voulu créer un espace de rencontres intergénérationnelles pour permettre aux femmes de tous les âges de dialoguer et de partager leurs expériences à partir d’un même constat : les femmes vivent une temporalité spécifique, qui n’est pas celle des hommes. On parle, à défaut d’autres termes, de « vieillesse », mais en réalité, il s’agit du sentiment, qui nous vient de cette injonction sociale à la jeunesse, d’être déjà vieille, ou déjà vieillissante. Moïra Sauvage a introduit cette rencontre en distinguant trois âges des femmes : les jeunes filles en fleur, les femmes dans la fleur de l’âge et les femmes aux fleurs de cimetières. Est toujours associée à la femme cette idée de la fleur, de la délicatesse, de la fragilité presque – idée que notre discussion a justement permis de contredire. Car la femme est aussi puissante, séductrice plus que séduisante, elle devient parole, action, elle n’est pas un avoir des hommes. La société et les hommes veulent la femme regardé plus que regardante, mais la femme féministe rejette ce dictat, comme elle l’a toujours fait, elle se détermine elle-même, elle trace sa propre voie, son propre chemin, celui qu’elle a choisi, celui qu’elle veut –, elle fait entendre sa voix que l’on a voulu taire.

On associe à tort la beauté à la jeunesse, déjà comme si ne pouvait être belle qu’une jeune fille en fleur, et également, comme si la beauté expliquait et excusait les comportements insultants des hommes à l’encontre des jeunes femmes. Ramenées à leur corporalité, les filles sont hypersexualisées en permanence, en faisant des Lolitas attendant leur Humbert Humbert. Aujourd’hui, elles rejettent les idéaux de soumission exacerbés par le cinéma et la pornographie, et mettent en garde contre les dangers d’une prétendue liberté sexuelle qui jouerait enfaite le jeu du patriarcat en appuyant la division déjà socialement ancrée dominant/dominé, et remettrait encore une fois les femmes au rang d’objet sexuel.

A l’inverse, les femmes dans la fleur de l’âge, revendiquent leur droit à la séduction, au jeu, elles s’affranchissent des dictats de la société. Elles se sentent libres et puissantes, plus qu’elles ne l’étaient lorsqu’elles étaient plus jeunes. Malgré ce consensus, les expériences sont partagées sur la maternité. Certaines, en ont gardé un souvenir magnifique, un sentiment de puissance et de liberté venu de cette capacité incroyable du corps à créer la vie. D’autres, au contraire, l’ont vécu comme une réification, comme leur assujettissement au rôle de procréatrice, finalement comme la négation de leur individualité. Nous sommes également revenues sur le temps qui passe et qui est associé à ce cycle du corps des femmes – les règles, l’accouchement, la ménopause –, qui sont ou ont été un plaisir pour certaines, et une douleur accablante et infernale pour d’autres.

Quant aux femmes aux fleurs de cimetière, elles ont davantage conscience du temps qui passe, et désirent ne pas vouloir perdre une minute à se regarder dans la glace et à ne pas s’aimer ! Elles n’ont pas le temps pour ça, elles veulent profiter de chaque instant pour exercer leur liberté. Et pourtant, elles observent bien qu’elles sont invisibilisées, rayées de l’espace public et médiatique, comme si elles ne faisaient pas partie de la société. D’ailleurs, on leur interdit l’amour et la sexualité, figées comme elles le sont dans les rôles de mère et de grand-mère, l’idée qu’elles puissent exister par elles-mêmes effraie. Et pourtant ! Elles aiment ! Elles couchent ! Les histoires d’amour comme les MST courent dans les EHPAD !

Cette table ronde était un moment important de partage sur la violence de l’oppression patriarcale et des injonctions, mais également un partage de nos ressentis – une occasion de comparer nos impressions et nos réalités, la manière dont nous vivons notre corps et le temps qui s’écoule à travers lui.

 

 

Retrouvez la conférence en replay ici

Ouvert à toutes et tous et gratuit !