A l’approche du 1er mai, journée internationale du travail, il apparait que ce sont les travailleuses qui paient le plus lourd tribut à la crise du covid-19.
Les métiers féminisés, épine dorsale du fonctionnement sociétal, sont les plus mal payés.
En période de pandémie, les métiers du « care » s’avèrent totalement indispensables à la survie collective, alors que, étant des métiers féminisés, ils sont honteusement dévalorisés. Le personnel hospitalier et des EPAHD est en majorité féminin comme celui de l’enseignement aussi, pour ne prendre que ces deux exemples.
Pourtant, ces métiers nécessitent des diplômes exigeants, des compétences relationnelles, ils entrainent une pénibilité non reconnue, et une prise de responsabilité telle que nos vies sont parfois entre leurs mains. La France est, parmi les pays développés, un de ceux qui rémunèrent le moins bien à la fois les infirmièr·e·s et les enseignant·e·s (OCDE2017).
Un plan de revalorisation des métiers des secteurs sanitaires, sociaux, éducatifs et de la dépendance doit être mis en place comme le montrent les recherches en économie.
Les femmes confinées se retrouvent dans des situations à haut risque : travail non rémunéré et violences accrues.
La double peine pour les femmes est la résultante des deux phénomènes connus et dénoncés depuis au moins 40 ans. Il existe toujours en moyenne, 25% d’écart de salaire entre les femmes et les hommes et ce, bien que la qualification et le niveau des diplômes des femmes ait dépassé celui des hommes.
Pourtant, au foyer, les femmes assurent toujours la majorité des taches ménagères, celle des soins aux enfants, aux ainés, aux personnes dépendantes de la famille. Ainsi donc, elles sont à la fois moins bien payées pour une charge de travail bien plus élevée. Ce paradigme, hélas bien connu, constitue un pilier fondamental du système patriarcal.
Une gouvernance néolibérale a, depuis 20ans, accentué les inégalités sociales et en particulier celles entre les femmes et les hommes (EIGE, Indice d’égalité 2019). Ainsi, par exemple la réforme de l’assurance chômage et celle des retraites, accroissent la pauvreté des femmes surtout pour les plus précaires : les mères à la tête des familles monoparentales, les femmes en situation de handicap, les migrantes concentrées dans les métiers du « care » et dans des métiers à haute flexibilité et exposés aux temps partiels subis.
Une crise des inégalités femmes/hommes au sein même de la crise sanitaire.
Avant même le début du confinement, on prévoyait une augmentation des violences intra-familiales. L’augmentation significative des dépôts de plaintes de plus de 30%, pour violence conjugales a donné lieu à quelques prises de mesures judiciaires et associatives qui constituent une goutte d’eau dans ce raz de marée que constitue la violence patriarcale. L’absence de moyens financiers à la hauteur du danger encouru quotidiennement par des milliers de femmes et enfants confiné·e·s avec leur parent violent est une forme de déni de la parole donnée par le chef de l’Etat qui s’était déclaré vouloir mettre en œuvre un grand plan de lutte contre ces violences lors de son quinquennat
Avec leur compagnon désormais à la maison, les femmes auraient pu espérer que leurs surcharges mentale et domestique s’allégeraient. C’est l’inverse qui se produit et de très nombreux témoignages montrent même l’épuisement de certaines. Le confinement n’a pas brutalement incité les compagnons au partage des tâches. En temps de crise, il est plus facile de se reporter sur les vieilles habitudes. En changer, suppose ne pas vivre dans un contexte rendu anxiogène par la pandémie.
Avec la crise sanitaire, les femmes se retrouvent également menacées de chômage ou de temps partiel, donc autant de risques de se voir appauvries, ce qui les expose au risque de retourner au foyer loin de l’émancipation économique, par épuisement à devoir tout gérer. Pour celles qui, parentes isolées, ayant un métier mal payé, en chômage partiel, discriminées par le handicap ou femme migrante, subissent des discriminations de sexe, de classe, de race, la crise sanitaire représente vraiment un risque de les faire passer de la précarité à la pauvreté.
Alors que les femmes représentent font front partout, ce sont surtout des hommes qui réfléchissent à la résolution de la crise. Ainsi le conseil scientifique qui ne comprend que 2 femmes sur 11 personnes dans un secteur, celui de la santé, ou les femmes sont très largement majoritaires !
Des actions immédiates sont nécessaires :
Les femmes doivent être représentées à égalité dans tous les processus décisionnels de résolution de la crise.
Les réponses d’urgence doivent être fondées sur les droits des femmes et prévoir des solutions de logements, d’allocations d’aide exceptionnelle aux femmes les plus en danger : familles monoparentales, femmes en chômage total ou partiel, régularisation des sans-papièr·e·s, mise à l’abri des mineur·e·s isolé·e·s, femmes touchées par la prostitution ou en situation de handicap.
Tous les risques de violence masculine auxquels sont exposées les femmes et les enfants doivent être reconnus, les mécanismes de protection être mis en place, entièrement financés et opérationnels pour soutenir toutes les victimes.
La construction d’une société véritablement émancipatrice passe par la reconnaissance du rôle des femmes dans tous les compartiments de la vie politique, sociale et économique.
– Marie-Paule Grossetete, vice-présidente de la CLEF et présidente d’OLF13
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