Revue de presse féministe & internationale du 19 au 23 mai

COMMUNIQUE DE PRESSE 20/05/2025 : Affaire French Bukkake : Une décision historique de la Cour de cassation
21 mai, 2025
Revue de presse féministe & internationale du 26 au 30 mai
28 mai, 2025
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Revue de presse féministe & internationale du 19 au 23 mai


FRANCE

Appel à la défiscalisation des pensions alimentaires pour plus de justice sociale

Ce jeudi 22 mai, la Fondation des Femmes a publié une tribune, signée par plusieurs associations, dont la CLEF, pour demander au gouvernement de rétablir la mesure de défiscalisation des pensions alimentaires, votée à l’Assemblée nationale en octobre 2024 mais suspendue par une censure gouvernementale. Cette mesure vise une justice fiscale et sociale plus équitable pour les mères isolées.

Quel est le constat de la situation des familles monoparentales en France ?

En France, une famille sur quatre est monoparentale, et dans 82 % des cas, c’est une femme qui en a la charge, le plus souvent avec une garde exclusive (8 cas sur 10). De ce fait, comme le rappelait le rapport “Le coût d’être mère” de la Fondation des Femmes en 2023, après la séparation, 97% des pensions alimentaires – destinées à contribuer à l’entretien et à l’éducation des enfants – doivent être versées par le père.

Pour information, le montant moyen d’une pension alimentaire en France s’élève à seulement 190 €, alors que le coût estimé des dépenses pour élever un enfant atteint 625 € par mois. Cela signifie que la pension ne couvre en réalité qu’un tiers des besoins de l’enfant, 70% des charges sont donc assumées par d’autres sources financières (cela peut être la mère, les aides sociales, la famille…)

En définitive, le niveau de vie des mères chute de 25% après la séparation. Elles se retrouvent à assumer la majorité des besoins de leurs enfants, alors même qu’elles rencontrent davantage de difficultés sur le marché du travail : elles sont plus touchées par le chômage, occupent plus souvent des emplois à temps partiel que les mères vivant en couple et sont davantage concernées par les contrats précaires.

Par conséquent, cette précarité de la mère se répercute automatiquement sur l’enfant. En effet, près d’un enfant sur deux vivant avec sa mère seule vit en situation de pauvreté (46 %). Par exemple, en 2022, selon l’INSEE, une famille monoparentale avec un enfant de moins de 14 ans est considérée comme pauvre si son revenu est inférieur à 1 581 € par mois.

En quoi la fiscalisation des pensions alimentaires est-elle injuste ?

Les pensions alimentaires sont déductibles des impôts pour la personne qui la verse et elles sont imposables pour la personne qui la reçoit. Si on se met dans la situation de la mère isolée (parent-gardien), le père, qui verse la pension alimentaire, bénéficie d’une déduction fiscale en déclarant la dépense, comme s’il avait payé pour une prestation de service, telle qu’une aide à domicile. La mère, de l’autre côté, se retrouve à devoir déclarer la somme touchée aux impôts car, dans les faits, celle-ci est considérée comme un revenu et non comme une véritable contribution aux besoins fondamentaux de l’enfant. Ce traitement fiscal est absurde et injuste puisqu’il augmente significativement le niveau d’imposition de la mère, voire la rend imposable.

“Parce qu’aucune mère ne devrait être pénalisée pour avoir élevé ses enfants.” – La Fondation des Femmes

Ainsi, le régime fiscal actuel profite à l’homme. Et la fiscalisation des pensions alimentaires contribue ainsi largement à la reproduction des inégalités financières entre les femmes et les hommes.

Autre constat crucial à avoir en tête : 30 à 40% des pensions alimentaires ne sont pas acquittées. Or, le fait de ne pas payer la pension alimentaire pendant au moins 2 mois constitue un délit d’abandon de famille.
La peine encourue pour ce délit est de 2 ans d’emprisonnement maximum et 15 000 € d’amende. En réalité, les condamnations sont rares.

Pour la fête des mères – soutenons les réellement. Signons la pétition !

Tribune/pétition, Défiscalisation des pensions alimentaires : justice fiscale et sociale pour les mères !, Fondation des Femmes, 22 mai 2025

« Pension alimentaire pour un enfant : montant, versement et révision”, Service Public, modifié le 12 mars 2025

Rapport : “le coût d’être mère”, La Fondation des Femmes, 2023

Terra Nova Jeunes. “La défiscalisation des pensions alimentaires : une mesure de progrès social et féministe”, La Grande Conversation, 30 avril 2025

Pension alimentaire : les parents qui la reçoivent pourront-ils bientôt la déduire de leurs impôts ?”, Ouest France, 24 octobre 2024

Amendement n°1-770 du Projet de loi de finance pour 2025, n°324, adopté le 23 octobre 2024

 


FRANCE

  Une étude récente révèle que les femmes polluent moins que les hommes 

 Selon une étude récente publiée par la London School of Economics “The gender gap in carbon footprints: determinants and implications” et réalisée par deux chercheuses françaises, Ondine Berland et Marion Leroutier, les femmes émettent 26 % de CO2 de moins que les hommes en ce qui concerne les transports et l’alimentation, les deux secteurs qui polluent le plus en France

Comme l’étude le montre, une partie de cet écart s’explique par des facteurs socio-économiques (le type d’emploi, le lieu de vie, etc.), des facteurs biologiques (besoins nutritifs plus importants chez l’homme). Cependant, jusqu’à 38% de cet écart en émission de CO2 reste inexpliqué.

“Nos résultats suggèrent que les normes de genre […] jouent un rôle important dans l’empreinte carbone individuelle” – Ondine Berland.

Selon les chercheuses, les deux principaux facteurs expliquant les différences d’émissions de carbone sont la consommation de viande rouge et l’utilisation de la voiture.

La viande rouge et la voiture, des biens à fort impact carbone, sont généralement associés à l’identité masculine traditionnelle. Les hommes consomment plus de viande rouge que les femmes et effectuent davantage de longs trajets dans des véhicules plus polluants. Notons que la consommation de viande et la possession de grosses voitures (et donc polluantes), sont des marqueurs de virilité qui sont aussi utilisés par les mouvements masculinistes.

L’autrice Amanda Castillo décrit dans son livre Tu seras carnivore mon fils les arguments tenus par les “viandards” pour expliquer pourquoi la consommation de viande serait indispensable à leur survie (à comprendre physiologique mais également sociale) et dresse un parallèle frappant entre consommation de chair animale et violences faites aux femmes.

D’après les autrices, l’écart d’émissions de gaz à effet de serre entre les hommes et les femmes s’explique moins par une sensibilité écologique plus développée chez ces dernières que par la répartition genrée des rôles au sein de la société et le poids des normes sociales.

De par la socialisation genrée, dès l’enfance, les filles sont souvent encouragées à être attentives aux autres, à faire preuve de responsabilité — des traits qui, à l’âge adulte, peuvent se traduire par une plus grande sensibilité à l’urgence climatique, à la protection de la planète et au sort des générations futures.

À l’inverse, réduire son impact écologique peut être perçu, par certains hommes — qui n’ont pas été socialisés selon ces normes — comme une atteinte à leur confort, leur liberté ou leur statut social. Ce coût symbolique plus élevé pourrait expliquer une tendance à relativiser ou à minimiser l’urgence climatique.

En outre, ceux qui prennent des initiatives écologiques sont souvent la cible de moqueries, accusés de manquer de virilité et qualifiés de « soy boys » (littéralement “hommes soja”), une insulte largement relayée dans les cercles masculinistes, notamment par Andrew Tate.

Pourtant, comme le rappelle Libération, “si tous les hommes adoptaient les mêmes habitudes que les femmes en matière de transport et d‘alimentation, 13,4 millions de tonnes en équivalent CO2 pourraient être évitées chaque année”.

Berland, Ondine. Leroutier, Marion. “The gender gap in carbon footprints: determinants and implications”, Grantham Research Institute on Climate Change and the Environment and London School of Economics, mai 2025.

Garric, Audrey. “Pourquoi les hommes émettent plus de CO2 que les femmes”, Le Monde, 17 mai 2025

“Les hommes polluent plus que les femmes parce qu’ils mangent beaucoup de viande rouge et conduisent davantage”, Vert, 14 mai 2025

“Revenu disponible mensuel correspondant au seuil de pauvreté selon la composition familiale, Données annuelles 2022”, INSEE, 2022

Disdero, Eléonore. “Empreinte carbone : viande rouge et voiture creusent l’écart entre les femmes et les hommes”, Libération, 14 mai 2025

 


PALESTINE

Documenter les violences à Gaza : un enjeu féministe

 Ce mois-ci, deux documentaires ont été diffusés afin d’informer sur les conséquences de la destruction de Gaza par l’État d’Israël. “Vies déplacées”, publié le 19 mai 2025 sur le Site de Médecins Sans Frontières, et “Put your soul on your hand and walk”, diffusé au Festival de Cannes le 15 mai 2025. Ces documentaires décrivent tous deux les violences subies par les femmes qui tentent de survivre, elles et leurs familles, dans une situation humanitaire catastrophique. 

Le 19 mai 2025, Médecins Sans Frontières a révélé le documentaire « Vies déplacées », tourné à Beit Lahia au nord de Gaza, qui suit le quotidien de cinq femmes de quatre générations contraintes de vivre sous des tentes dans un environnement marqué par la violence des attaques. Le reportage rapporte leur récit et la réalité insoutenable d’un territoire où les frappes militaires israéliennes détruisent non seulement les infrastructures, mais aussi les vies des Palestinien·ne·s.

Parallèlement, l’organisation Médecin Sans Frontières alerte sur l’instrumentalisation de l’aide humanitaire, désormais conditionnée par Israël et les États-Unis à des objectifs militaires, détournant ainsi cette aide vitale au détriment de la population civile. Les différents communiqués de Médecins Sans Frontières dénoncent un nettoyage ethnique : destruction des structures médicales – au moins vingt hôpitaux ont été endommagés ou rendus inopérants en une semaine –, ordres d’évacuation, coupures d’eau, pénurie alimentaire et explosion de la malnutrition, notamment infantile.

À Gaza, 90 % de la population n’a plus aucun moyen de subsistance. (Médecins Sans Frontières)

Dans ce contexte, les femmes jouent un rôle crucial. Comme le décrit Amande Bazerolle, coordinatrice d’urgence de MSF, elles « cherchent des herbes comestibles, cuisinent sur des feux improvisés, tandis que les enfants font la queue pour de l’eau et que les hommes tentent de ramener de quoi manger ».

Il y a un mois, le 16 avril 2025, Fatima Hassouna, jeune photojournaliste palestinienne de 25 ans, a été tuée lors d’une frappe israélienne à Gaza, avec plusieurs membres de sa famille. Surnommée Fatem, elle est photojournaliste à Gaza et la protagoniste principale du documentaire Put Your Soul on Your Hand and Walk, réalisé par Sepideh Farsi, sélectionné dans la section ACID (Association du cinéma indépendant pour sa diffusion) du Festival de Cannes 2025. Fatima Hassouna devait être présente au Festival de Cannes pour assister à la diffusion du documentaire le 15 mai 2025, sur lequel elle avait travaillé depuis des mois. Le documentaire fut tout de même diffusé à Cannes la semaine dernière, mais avec une dimension de femmage posthume qui n’aurait pas dû exister.

Dans une tribune publiée dans Libération, Sepideh Farsi rend hommage à cette Fatouma Hassouna dont les photographies et vidéos témoignent avec force de la vie quotidienne sous les bombes. Fatem incarnait la résistance et la dignité de Gaza : « J’en suis fière… Quoiqu’ils fassent, ils ne pourront pas nous vaincre…On n’a rien à perdre. »

Fatem avait ouvert une fenêtre sur la réalité que les médias peinent à rendre visible : « Je veux que les gens voient les images de ce génocide, qu’ils sachent ce que nous avons vécu et ce que nous avons traversé. ». La projection du film et l’exposition de ses photographies à Cannes soulignent la nécessité de documenter les violences en cours dans la région mais aussi de porter la voix des femmes palestiniennes.

Face à cette situation dramatique, plusieurs voix européennes se sont élevées. Le 20 mai, 17 États membres de l’Union européenne, dont la France, ont demandé à la Commission européenne d’examiner le respect par Israël des droits humains à Gaza, premier pas vers une suspension possible de l’accord d’association UE-Israël. Cet accord, en vigueur depuis 2000, conditionne les relations commerciales et politiques au respect des droits fondamentaux. Parallèlement, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) a publié une déclaration appelant à un engagement diplomatique fort pour mettre fin aux hostilités et stopper la destruction de Gaza et de sa population civile.

Médecins Sans Frontières, “Gaza : « Vies déplacées » 5 femmes à Beit Lahia, au cœur de la guerre”, 19 mai 2025 

Médecins Sans Frontières, “Gaza : MSF dénonce le plan israélien de contrôle de l’aide humanitaire, un pas de plus vers l’éradication des Palestiniens à Gaza”, 14 mai 2025 

Médecins Sans Frontières, “Gaza : MSF dénonce l’instrumentalisation de l’aide et la destruction du système de santé”, 21 mai 2025 

Léa Masseguin, “A Gaza, «les hommes sont chargés de ramener de quoi manger, les enfants font la queue pour de l’eau et les femmes s’efforcent de cueillir des herbes comestibles»”, Libération, 15 mai 2025

Luc Mathieu et Jean Quatremer, “Gaza : l’Union européenne met la pression sur Nétanyahou en évoquant une suspension de l’accord d’association avec Israël”, Libération, 20 mai 2025

Clarisse Fabre et Murielle Joudet, “Au Festival de Cannes, l’émotion autour du documentaire sur la photojournaliste Fatima Hassouna, tuée à Gaza”, Le Monde, 16 mai 2025 

Libération, “Fatma Hassouna, les yeux de Gaza par Sepideh Farsi”, 17 avril 2025